Pollution atmosphérique : quels effets sur la santé ?

Première cause environnementale de mort évitable, la pollution de l’air tue chaque année près de 48 000 Français. Même à faible niveau de concentration, les polluants que nous respirons quotidiennement ont un impact sur le développement des cancers et des pathologies cardiovasculaires et respiratoires. Bien qu’il soit difficile de se soustraire à cette pollution, des mesures de bon sens permettent toutefois de limiter l’exposition.

Selon une enquête Harris interactive présentée en septembre dernier lors des Journées de rentrée de la Mutualité française, 92 % des Français estiment que l’environnement et la santé sont étroitement liés. Et ils semblent bien avoir raison, du moins en matière de qualité de l’air : dans une revue d’études publiée en juin 2016, l’agence Santé publique France note que la pollution atmosphérique « est désormais considérée comme la première cause environnementale de mort prématurée dans le monde ». Rien qu’en France, elle serait responsable de 48 000 décès par an et représenterait la troisième cause de mortalité. Toujours selon l’agence, dans les villes et les sites les plus touchés (la région parisienne, le Nord-Est de la France et l’axe Lyon-Marseille, notamment), la pollution de l’air correspondrait à une perte d’espérance de vie pouvant dépasser deux ans.

« Les principales sources de polluants atmosphériques sont désormais bien connues, explique Johanna Lepeule, chercheuse à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm, Institute for Advanced Biosciences, IAB). Parmi les activités humaines, c’est-à-dire celles sur lesquelles on peut agir, il s’agit essentiellement de l’industrie, du chauffage résidentiel et des transports routiers. » D’après un document publié en avril 2016 par la Direction générale de la santé, les particules sont les polluants chimiques qui suscitent le plus d’inquiétudes en matière d’impact sur la santé humaine, notamment les particules fines PM10 et PM2.5, l’ozone (O3), le dioxyde d’azote (NO2), les composés organiques volatils (benzène et formaldéhyde), les hydrocarbures aromatiques polycycliques et les métaux (arsenic, chrome, cadmium).

Infarctus et AVC

Après plusieurs années d’exposition, même à faible niveau de concentration, « la pollution atmosphérique a un effet sur le développement des pathologies chroniques respiratoires et cardiovasculaires, avec des conséquences directes sur l’ischémie, l’hypertension et l’athérosclérose (responsables notamment des infarctus et des AVC, NDLR) », précise la chercheuse. Depuis 2013, les particules et d’une manière plus générale la pollution de l’air extérieur sont classées comme cancérogènes pour l’homme par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ). Des études plus récentes évoquent quant à elles un lien avec des troubles de la reproduction, de la grossesse (faible poids à la naissance, prématurité), des altérations du développement de l’enfant, des pathologies neurologiques et des atteintes cognitives.

A court terme, l’élévation ponctuelle des niveaux de pollution a des conséquences plus immédiates (irritations oculaires, rhino-pharyngites, bronchites) et peut aussi exacerber les pathologies chroniques, en déclenchant des crises d’asthme, des accidents cardiovasculaires et des AVC. Mais, comme le soulignent les travaux de Santé publique France, c’est bien « l’exposition quotidienne et dans la durée qui a l’impact le plus important […], les pics de pollution ayant un effet marginal ». En matière de pollution atmosphérique, les données disponibles n’ont malheureusement pas mis en évidence de seuil sous lequel il n’y aurait pas d’effet sur la santé.

Peut-on se protéger ?

S’il semble difficile de se soustraire à la pollution atmosphérique, certaines précautions peuvent être prises. Les recommandations des autorités sanitaires s’adressent en priorité aux sujets les plus sensibles (enfants, personnes âgées, malades chroniques et femmes enceintes), mais en réalité tout le monde est concerné. On conseille par exemple d’aérer les logements en dehors des heures de pointe, de privilégier les espaces verts et d’éviter les zones de trafic routier autant que possible. « En zone urbaine, on observe des niveaux de concentration réduits dès que l’on s’éloigne de quelques mètres des axes de circulation », indique Johanna Lepeule. Quand la pollution est très élevée, il est préférable de ne sortir les enfants qu’en début de matinée et en fin de journée et d’éviter l’exercice physique intensif. Sachez enfin que fumer, être exposé à la fumée du tabac, aux émissions de barbecue, aux pollens, aux solvants, aux peintures et aux colles utilisés dans les espaces intérieurs peut aggraver les effets de la pollution de l’air.

 

Quelle pollution à la campagne ?

Contrairement aux idées reçues, la pollution de l’air n’affecte pas que les villes. Si ses effets sanitaires sont plus importants dans les grands espaces urbains,  « quelques communes identifiées comme rurales sont en fait sous influence industrielle et connaissent des concentrations en polluants atmosphériques importantes, par exemple autour de l’étang de Berre ou dans l’Est de la France », indique l’agence Santé publique France dans une revue d’études présentée en juin 2016. Du fait des particules fines PM2.5, par exemple, la perte d’espérance de vie en zone rurale est estimée à neuf mois en moyenne. Les zones périurbaines et rurales (en particulier celles des régions Rhône-Alpes et Paca) se caractérisent par des concentrations d’ozone généralement plus importantes que dans les centres-villes, notamment à partir du mois de juin, lorsque les températures s’élèvent. Enfin, au printemps, l’air des campagnes est davantage impacté par les activités agricoles émettrices de particules primaires (travaux des champs, épandage d’engrais et de pesticides). De son côté, l’élevage apparaît comme le principal émetteur d’ammoniac sur le territoire

Pollution de l’air : une question de choix politique

Bien que la qualité globale de l’air se soit sensiblement améliorée ces dernières années, notamment grâce aux aménagements du trafic routier et aux normes d’émission imposées aux industries, la mobilisation est encore largement insuffisante selon les scientifiques. En janvier 2017, accompagnés de plusieurs médecins et ONG, certains d’entre eux ont lancé un appel pour alerter les pouvoirs publics sur l’urgence de mesures anti-pollution plus contraignantes. « La pollution atmosphérique n’est pas une fatalité, c’est une question de choix sociétal et politique, affirme Johanna Lepeule, chercheuse à l’Inserm (Institute for Advanced Biosciences, IAB). Il y a toute une palette d’outils que l’on peut utiliser : diminuer davantage les émissions industrielles et celles liées au trafic routier, améliorer la technologie des véhicules, limiter le chauffage au bois non performant ou encore privilégier les formes urbaines qui proscrivent les rues en canyon (rues étroites aux immeubles élevés qui limitent la dispersion des polluants, NDLR), l’usage de véhicules individuels et l’installation d’écoles ou de maisons de retraite près des périphériques. Parce que les sources de pollution sont multiples, on peut, et on doit, jouer sur différents tableaux pour vraiment limiter les expositions. » D’après l’agence Santé publique France, si toutes les communes françaises respectaient la valeur recommandée par l’OMS pour les particules fines PM2.5 (10 μg/m3), plus de 17 000 décès pourraient être évités chaque année.

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