Docteur Brigitte Sandrin : « L’éducation thérapeutique permet au patient d’être acteur de sa maladie »

Le docteur Brigitte Sandrin, médecin de santé publique, est la directrice de l’Association francophone pour le développement de l’éducation thérapeutique (Afdet). Pour elle, l’éducation thérapeutique (ETP) doit être intégrée plus systématiquement au parcours de soins des malades.

Quel est l’intérêt de l’ETP pour les patients ?

L’ETP comporte tout ce qui va permettre aux malades chroniques de vivre au mieux avec leur pathologie et de pouvoir mener à bien leurs projets. Elle leur permet de prendre soin d’eux, d’être acteurs de leur maladie et de participer aux choix qui les concernent dans de bonnes conditions. L’ETP va au-delà de la seule question de l’observance des traitements car le patient est invité à faire part des contraintes de sa vie quotidienne (travail, loisirs, famille, etc.) et à parler de ses éventuelles difficultés à changer, par exemple, certaines habitudes. L’équipe médicale doit alors s’adapter et trouver, avec le patient, des solutions concrètes. C’est un travail collaboratif entre les patients et les professionnels de santé. De ce fait, l’ETP bouleverse les relations traditionnelles entre soignant et soigné. Il faut adapter la prise en charge à chacun et changer de paradigme.

Où en est-on en France aujourd’hui ?

La loi Hôpital patients santé territoires (HPST) de 2009 a inscrit l’ETP dans le parcours de soins du patient avec pour objectif de rendre ce dernier plus autonome. Concrètement, des programmes d’ETP sont construits selon un cahier des charges national très complexe et ils sont mis en œuvre au niveau local, après autorisation des agences régionales de santé. Cette loi a permis la reconnaissance de cette activité comme une dimension essentielle des soins. Toutefois, les programmes d’ETP sont souvent basés sur une liste d’apprentissages établie par les soignants plutôt que sur une démarche personnalisée, construite dans le cadre d’un véritable échange entre les professionnels de santé et les malades.

Que fait votre association pour promouvoir l’ETP ?

Nous animons des formations à destination des équipes soignantes. Nous leur proposons aussi un accompagnement avec une analyse des pratiques et un suivi dans le temps. L’objectif est de faire le point sur ce qui est déjà mis en place et de voir, ensemble, ce qu’il est possible d’améliorer. Nous formons aussi les associations de patients afin qu’elles aident ensuite les malades chroniques qui viennent les voir. Nous développons d’ailleurs de plus en plus de formations mixtes, patients-soignants, tant du côté des participants que du côté des animateurs. Les partages d’expériences et les échanges apportent plus de richesse. Enfin, nous organisons chaque année un congrès « Santé éducation », qui donne la parole à des experts francophones de l’ETP et à des professionnels de terrain, et nous éditons un journal en ligne qui s’adresse à toute personne intéressée par les relations entre soignants et soignés.

Que peuvent apporter les outils numériques ?

Ces outils offrent de nouvelles possibilités, notamment au niveau de l’accessibilité. Les professionnels et les patients qui interviennent dans un programme doivent avoir suivi une formation d’au moins 40 heures en éducation thérapeutique dont une partie peut être organisée en e-learning. Par ailleurs, pour des patients qui habitent loin de la structure où se déroule un programme d’ETP ou qui ont des difficultés pour se déplacer, certaines équipes mettent en place des sessions en visioconférence pour garder plus facilement le contact. Le digital a aussi permis la création d’un grand nombre d’applications santé. Celles-ci constituent de précieux soutiens à condition qu’elles ne soient pas utilisées comme de simples outils de contrôle mais qu’elles soient au service du dialogue et de la réflexion entre les patients et les professionnels de santé.

Quels sont les enjeux à venir ?

Pour l’heure, les programmes d’ETP sont très majoritairement hospitaliers avec des unités transversales d’éducation thérapeutique du patient (Utep) et des pôles ressource en éducation thérapeutique au niveau local. Mais cela n’est pas suffisant : il faut que l’ETP soit plus développée en médecine de ville. Beaucoup de malades chroniques ne sont en effet suivis que par leur médecin traitant. Et même pour ceux qui vont à l’hôpital, l’ETP ne doit pas s’arrêter à la sortie de l’établissement. Il faut donc plus de coordination entre la ville et l’hôpital pour proposer un suivi complet. C’est justement l’une des propositions que nous avons émises dans le plaidoyer intitulé « 20 idées pour réinventer l’ETP » que l’association a publié en 2018, en collaboration avec plusieurs Utep et pôles ressources en ETP.

Pour en savoir plus : Afdet.net.

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L’#éducationthérapeutique permet aux malades chroniques de mieux vivre avec leur pathologie mais aussi d’être partie prenante dans les décisions qui les concernent.

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