Donner pour sauver des vies

Chaque année, les dons de produits sanguins et de moelle osseuse permettent de sauver la vie de milliers de patients victimes de maladies graves du sang ou d’hémorragies massives. A quoi servent ces dons exactement, qui peut donner et comment se déroulent les prélèvements ? Toutes les réponses dans notre dossier.

Pourquoi donner ?

Don de sang

Aujourd’hui, on ne sait pas fabriquer de sang artificiel et il n’existe aucun traitement ni médicament de synthèse capable de se substituer au sang humain. Le don du sang, un acte bénévole, anonyme et sécurisé, est donc irremplaçable. « Chaque année en France, ce geste permet de soigner un million de personnes, explique le docteur Bruno Danic, directeur de l’Etablissement français du sang (EFS) de Bretagne. Les besoins nécessitent actuellement 10 000 dons par jour ; en raison de l’allongement de l’espérance de vie et des progrès de la médecine, ce chiffre a régulièrement eu tendance à augmenter au cours des dernières années. »
Dans le détail, « les produits sanguins issus du don du sang sont utilisés dans deux grands cas de figure : les situations d’urgence comme les hémorragies massives consécutives à un accident de la route ou une intervention chirurgicale ; le traitement des maladies graves du sang, comme la leucémie, précise le docteur Danic. Ils servent aussi à fabriquer des médicaments à partir des protéines contenues dans le plasma ». La mobilisation régulière des donneurs est également nécessaire parce que ces produits ont une durée de vie limitée : les plaquettes (responsables de la coagulation du sang) se conservent uniquement sept jours et les globules rouges (transporteurs de l’oxygène) jusqu’à 42 jours. La situation est un peu différente pour le plasma (qui permet la circulation des globules et des plaquettes dans l’organisme) : il peut être congelé et conservé jusqu’à un an.

Don de moelle osseuse

Essentielle à la vie, la moelle osseuse (à ne pas confondre avec la moelle épinière) est l’usine qui fabrique les cellules souches hématopoïétiques à l’origine des cellules du sang (globules rouges, globules blancs et plaquettes). On la trouve dans tous les os du squelette et en particulier dans les os plats comme ceux du bassin. Les maladies graves du sang (leucémie, lymphome, aplasie médullaire…) sont la conséquence d’un dysfonctionnement de la moelle osseuse. La greffe peut aider à guérir 80 % de ces pathologies, mais elle ne peut se faire que lorsque la compatibilité entre le donneur et le receveur est parfaite. Or « un malade a une chance sur quatre d’être compatible avec un frère ou une sœur, alors que la probabilité de compatibilité entre deux individus pris au hasard n’est que d’une sur un million », indique le docteur Evelyne Marry, directrice du prélèvement et des greffes de cellules souches hématopoïétiques à l’Agence de la biomédecine. S’inscrire sur le registre des donneurs de moelle osseuse permet donc d’améliorer les probabilités de trouver une personne compatible et représente une chance supplémentaire de survie pour les patients (en France, près de 2 000 personnes bénéficient d’une greffe de moelle osseuse chaque année).

Qui peut donner ?

Don de sang

Toute personne âgée de 18 à 70 ans et pesant plus de 50 kilos peut être éligible au don de sang. Pour garantir la sécurité du receveur, une série de contre-indications sont en outre définies par arrêté ministériel. Ces dernières peuvent être liées à un état de santé spécifique ou à des antécédents médicaux (maladies chroniques et évolutives, infection et fièvre supérieure à 38 °C datant de moins de deux semaines, antécédents de greffe ou de transfusion…). Les contre-indications concernent aussi les pratiques personnelles (tatouage ou piercing récents, consommation de drogue par voie intraveineuse…), les récents séjours à l’étranger dans les pays où sévissent certaines maladies comme le paludisme, le chikungunya, la dengue ou la maladie de Chagas (Amérique latine, pays tropicaux, Proche-Orient et Moyen-Orient, essentiellement). « Il y a aussi des critères à respecter concernant les comportements sexuels à risque afin d’éviter la transmission de virus comme le VIH ou l’hépatite B », note le docteur Danic. Avant de donner son sang, on doit par exemple respecter quatre mois d’absence de relations sexuelles avec plusieurs partenaires s’il l’on est hétérosexuel et un an si l’on est un homme homosexuel. « D’autres contre-indications visent quant à elles à protéger le donneur », assure Bruno Danic. Ainsi, les personnes souffrant d’anémie, d’une maladie cardio-vasculaire ou d’une anomalie cardiaque ne peuvent pas participer.

Don de moelle osseuse

L’inscription sur le registre des donneurs de moelle osseuse est en principe possible pour toute personne âgée de 18 à 50 ans. Cependant, comme pour le don de sang, le respect de certaines contre-indications permet de protéger à la fois le donneur et la personne greffée. On ne pourra donc pas donner si l’on est atteint d’une maladie cardiaque, d’une pathologie du système nerveux, d’une affection respiratoire, métabolique (diabète, insuffisance hépatique) ou neuromusculaire, d’hypertension artérielle, ou si l’on a un antécédent de cancer, de phlébite, d’embolie pulmonaire ou d’œdème de Quincke. Idem pour toute personne prenant des médicaments sur le long terme pour le traitement d’une maladie chronique.
Par ailleurs, même si aucun volontaire en bonne santé n’est écarté, l’Agence de la biomédecine cherche surtout des donneurs jeunes car « leur moelle est beaucoup plus riche et active, note le docteur Marry. Il y a aussi un critère lié au sexe : nous essayons de rééquilibrer le registre en donneurs masculins qui ne représentent que 37 % du fichier, contre 63 % pour les femmes ». Enfin, certains profils sous-représentés comme les personnes originaires d’Afrique du Nord, d’Afrique sub-saharienne ou métissées sont également particulièrement recherchées.

Comment donner ?

Don de sang

Pour donner son sang, il faut en premier lieu se rendre sur le site Internet de l’EFS (dondesang.efs.sante.fr), l’organisme public gestionnaire du don de sang en France. Un rapide questionnaire en ligne permet de repérer les principales contre-indications. Le site permet aussi de déterminer le lieu de collecte (fixe ou mobile) le plus proche. Avant de venir donner son sang, il faut veiller à être en forme, bien s’hydrater, ne pas avoir consommé d’alcool et éviter d’être à jeun. Une fois sur place, le donneur remplit un questionnaire, puis est reçu par un infirmier ou un médecin de l’EFS qui s’assure, lors d’un entretien confidentiel (entretien prédon), que le don ne présente aucun risque ni pour lui ni pour le receveur. Le prélèvement s’effectue en position allongée et ne dure que 10 minutes. Avant de repartir, le donneur est invité à se reposer pendant une vingtaine de minutes lors d’une collation partagée avec d’autres bénévoles. Au total, il faut compter environ 45 minutes pour effectuer un don de sang, de l’arrivée au départ.
Ce type de don, appelé « don de sang total » (DST), est la forme la plus courante. Il permet de prélever en même temps tous les composants sanguins qui seront ensuite séparés (on ne transfuse au receveur que ce dont il a besoin : des globules rouges, des plaquettes ou du plasma). Mais il existe aussi deux autres types de don plus spécifiques : le don de plasma et celui de plaquettes.
Le don de plasma. Il s’adresse aux personnes âgées de 18 à 65 ans en bonne santé, s’effectue toujours sur rendez-vous et uniquement dans les lieux de collecte fixes de l’EFS. Il se fait par aphérèse : le sang prélevé passe dans une centrifugeuse qui conserve le plasma et retourne les autres composants sanguins au donneur. Le prélèvement en lui-même dure environ une heure, et il faut prévoir à peu près une heure et demie au total, de l’arrivée au départ. Le plasma contient des protéines d’un intérêt thérapeutique majeur pour de nombreux malades (grands brûlés, hémophiles, enfants immunodéprimés) et son prélèvement sert essentiellement à fabriquer des médicaments dérivés du sang.
Le don de plaquettes. Comme le don de plasma, le don de plaquettes est ouvert aux personnes en bonne santé de 18 à 65 ans, affichant un taux de plaquettes suffisamment élevé. Il a lieu sur rendez-vous, toujours dans un lieu de collecte fixe et se fait également par aphérèse. Ce type de prélèvement, pour lequel il faut compter 90 minutes environ (soit deux heures en tout), permet d’obtenir six fois plus de plaquettes qu’un don de sang total. Celles-ci sont transfusées aux patients dont la maladie (leucémie, lymphome) ou les traitements lourds (chimiothérapie, radiothérapie) empêchent la fabrication de cellules sanguines par la moelle osseuse. Les plaquettes permettent d’éviter les risques d’hémorragies qui mettent leur vie en danger.

Don de moelle osseuse

Pour devenir donneur de moelle osseuse, il faut en premier lieu se préinscrire par e-mail, courrier ou téléphone auprès de l’Agence de la biomédecine (agence-biomedecine.fr). Le candidat doit ensuite se rendre à un entretien médical et effectuer une prise de sang qui déterminera son typage HLA (de l’anglais human leukocyte antigen) et sa carte d’identité biologique. Après cette étape, s’il ne présente pas de contre-indications, les caractéristiques du futur donneur sont ajoutées au registre France greffe de moelle. Contrairement au don de sang, sa moelle osseuse ne sera pas prélevée immédiatement ; il sera contacté uniquement si un patient en attente de greffe est compatible (ce qui peut prendre plusieurs années). Si le donneur est toujours d’accord pour donner sa moelle osseuse, une date de prélèvement est fixée (généralement entre un et trois mois plus tard). Avant le jour J, il devra passer un nouvel entretien et des examens sanguins pour vérifier qu’il est en bonne santé. Il devra aussi se rendre au tribunal de grande instance pour y déposer un consentement formel pour le don.
Deux types de prélèvement. Le don de moelle osseuse peut se faire selon deux techniques : le prélèvement dans le sang par aphérèse et le prélèvement dans les os postérieurs du bassin (la décision revient au médecin greffeur, qui opte pour la technique la plus adaptée au patient en attente de greffe). Avant un prélèvement par aphérèse, le donneur reçoit pendant quelques jours un traitement par injection sous-cutanée, destiné à stimuler la production de cellules de la moelle osseuse et à les faire passer des os vers le sang où elles seront récupérées. Le jour du don, une infirmière prélève le sang (pendant quatre heures environ) à l’aide d’une machine qui trie les constituants sanguins pour ne garder que les cellules souches, tandis que les autres composants sont réinjectés au donneur. Cette méthode, qui permet de recueillir un grand nombre de cellules souches, est la plus fréquente (environ 80 % des prélèvements).
Parfois, il est nécessaire de recueillir à la fois les cellules souches et les éléments de leur environnement naturel : pour cela, on prélève directement dans les os postérieurs du bassin qui sont très riches en moelle osseuse. Cette intervention nécessite une anesthésie générale et quarante-huit heures d’hospitalisation. Des douleurs comparables à celles d’un gros bleu peuvent ensuite persister pendant quelques jours en bas du dos. Elles se traitent facilement par des antalgiques classiques. Un arrêt de travail d’une semaine peut être prescrit si nécessaire. Enfin, il faut savoir que, comme pour toutes les greffes impliquant un patient qui n’a aucun lien de parenté avec le donneur, le don de moelle osseuse est anonyme. Le donneur ne saura donc jamais à qui sa moelle a été transfusée ni si la greffe a fonctionné. En revanche, il a la possibilité d’écrire anonymement au receveur (qui pourra lui répondre) en transmettant un courrier à l’Agence de la biomédecine.

Don du sang : les périodes tendues

La période de Noël est un moment particulièrement sensible pour les réserves de l’Etablissement français du sang (EFS). « Les mois de décembre et de janvier cumulent tout ce qui peut perturber la collecte, explique le docteur Bruno Danic, directeur de l’EFS de Bretagne. Les épidémies hivernales freinent le don parce qu’il faut attendre quinze jours après une infection pour pouvoir donner son sang. C’est aussi un moment où il peut y avoir d’importantes intempéries qui limitent les déplacements. En raison des fêtes et des congés, les donneurs sont également moins disponibles. Résultat : les réserves de produits sanguins diminuent alors que les besoins des malades restent les mêmes. » D’autres moments de l’année, comme les congés d’été et les ponts de mai, sont aussi plutôt tendues. C’est également le cas du mois de septembre : la rentrée, qui signe la reprise de l’activité hospitalière, se traduit par une hausse importante de consommation de produits sanguins. Aussi, si vous souhaitez donner votre sang, n’hésitez pas à vous mobiliser pendant ces périodes.

Du don de sang de cordon à la greffe haplo-identique

Comme la moelle osseuse, le sang contenu dans le cordon ombilical et le placenta du nouveau-né peut sauver la vie des patients atteints de graves maladies du sang. Prélevé lors de l’accouchement, il a la particularité de contenir des cellules souches et d’être encore immature, ce qui lui permet d’être transmis à un patient sans que la compatibilité soit totale. « Ce type de greffe a beaucoup évolué en France pendant les années 2011-2015, explique le docteur Evelyne Marry, directrice du prélèvement et des greffes de cellules souches hématopoïétiques à l’Agence de la biomédecine. Il constitue un complément lorsqu’il n’existe pas de donneur intrafamilial compatible et que l’on ne trouve pas de donneur sur le registre des donneurs de moelle osseuse. » Mais parce qu’un don de sang de cordon ne garantit pas forcément l’obtention d’un greffon (il faut qu’il y ait suffisamment de cellules souches), les cliniciens cherchent aujourd’hui à développer une autre technique en parallèle : la greffe haplo-identique. Ici, les donneurs de moelle osseuse potentiels, qui sont les parents biologiques, un frère, une sœur ou un enfant du patient, n’ont besoin d’être compatibles qu’à hauteur de 50 % (haplo signifie « à moitié »). Après la transfusion du greffon, le receveur reçoit un traitement médicamenteux qui s’attaque à son système immunitaire afin de favoriser la prise de greffe. « Les médecins disposent désormais d’un arsenal thérapeutique plus étendu qui augmente les chances de guérison des malades », conclut le docteur Marry.

Pour en savoir plus :
• Etablissement français du sang : Dondesang.efs.sante.fr ou 0 810 150 150.
• Agence de la biomédecine : Agence-biomedecine.fr ou 0 800 20 22 24.

Print ou web ?
Faites-nous savoir sur quel support vous diffusez nos articles. Une minute suffit.

J’y vais !


Les visuels (photos, infographies, etc.) fournis par la Ciem doivent être utilisés uniquement pour illustrer les articles de France Mutualité.
Il est strictement interdit d’utiliser l’un des visuels dans un autre cadre.